Article édité avec l’aimable autorisation de son auteur : le Dr Liagre Joël, que vous pouvez retrouver sur son blog
Il suffit de voir la pile de livres dans les librairies, le régime Dukan bat tous les records . Difficile de ne pas connaitre dans son entourage une personne qui le suit. Après le régime sans glucide d’ATKINS, voila la diète protéinée, certes pas nouvelle, mais habillée moderne.
Grand succès, car facile, rapide, sans effort
Cela colle bien avec notre époque. Si une alimentation basée seulement sur les protéines est sans trop de danger sur une courte période , il n’en est pas de même si elle est suivie longtemps, sur plusieurs mois.
Car l’homme est un omnivore, pas un carnivore. Le système digestif humainest prévu pour une alimentation diversifiée.
Un régime hyper protéiné perturbe le métabolisme. Le corps pense qu’il jeûne, bien qu’il ait avalé une quantité correcte de nourriture. Les signaux d’alarme se déclenchent et le métabolisme se met en mode d’urgence, une condition connue sous le nom de cétose.
Car pendant le jeûne, le corps a une seule priorité : maintenir le cerveau en activité à tout prix.
La quantité de glucides minimales pour assurer la fourniture de glucose au cerveau, pour un fonctionnement optimal, est de 130 g par jour.
En l’absence d’apports glucidiques, l’organisme se met à produire des corps cétoniques , c’est la roue de secours.
Les corps cétoniques sont produits par le foie, ils diffusent dans le plasma, et ont des devenirs distincts selon le corps cétonique considéré :
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L’acétone, très volatile, est un déchet métabolique qui est éliminé dans l’air par les poumons, conférant à l’haleine une odeur caractéristique.
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L’acéto-acétate et le ß-hydoxybutyrate sont transporté jusqu’aux tissus extra-hépatiques, notamment le tissu cardiaque et le tissu nerveux. Eux seuls sont considérés comme de nouveaux substrats énergétiques.
Lorsque la concentration plasmatique en corps cétoniques augmente de façon importante, les corps cétoniques étant des acides faibles, il y un risque d’acidification au niveau sanguin, pouvant conduire à une acidose sévère et une mort neuronale.
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La cétose coupe l’appétit ce qui permet de supporter la diète.
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La diète protéinée donne une mauvaise haleine, par l’élimination de l’acétone.
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La diète protéinée est une cause majeure de dysbiose, car il y un excès de putréfaction ++ par apport massif de protéines.
D’où risque de mauvaise haleine et gaz putrides.
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Pour assurer la néoglucogenèse, qui permet la fabrication de glucose à partir de molécules non glucidiques ( glycérol, acide lactique, certains acides aminés ) il y afflux d’ Acides Aminés qui doivent être désaminés par le foie.
La désamination produit de l’ammoniaque, qui est toxique pour le foie et le rein.
La diète protéinée induit une perte de potassium, parfois très importante.
Risque d’hypokaliémie, parfois grave.
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la diète protéinée augmente l’excrétion urinaire du calcium, par augmentation de la PTH , entrainant rapidement un mécanisme de déperdition du calcium osseux.
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La diète protéinée entraine une perte d’eau : déshydratation.
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La diète protéinée est responsable d’un relargage important de xénobiotiques et d’hormones liposolubles dans la circulation sanguine.
Car le tissu adipeux est un lieu de stockage.
D’où surcharge du foie ++ et risque d’hyper oestrogénie ++, qui peut allumer une lésion pré cancéreuse.
Cette diète ne fournit pas les vitamines et les minéraux essentiels, les fibres.
Un régime riche en protéines animales, en graisses saturées et en cholestérol augmente les taux de LDL cholestérol.
D’où augmentation des risques cardio-vasculaires.
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La diète protéinée perturbe le fonctionnement de la 5′-deiodinase qui convertit la T4 en T3.
La T4 est convertit par la 5-deiodinase en T3 reverse, hormone inactive.
Ce qui explique l’hypothyroïdie qui suit la diète, source de fatigue et la reprise de poids rapide.
Cette perte de poids facile est donc une catastrophe métabolique.
Il est probable que pour les gens qui suivent cette diète sur le long cours, les conséquences sur la santé soient, parfois dans de nombreuses années, dévastateurs, car on ne bouleverse pas le métabolisme aussi profondément sans dommages.
Et cette approche du sur-poids oublie totalement l’individu, en agissant seulement sur les kilos en trop, et évitant soigneusement le plus important, à savoir ce qui, dans l’équilibre, ou surtout le déséquilibre de la personne, se cache derrière cette prise de poids.
Si l’on oublie (est-ce vraiment un oubli ?) de prendre en charge la personne dans son équilibre hormonal, immunitaire, neuro-végétatif.
L’échec est inéluctable et lourd de conséquences.